Le malaise des juifs éthiopiens en Israël
Depuis leur arrivée en Israël dans les années 1980, les Falashas, des juifs d’origine éthiopienne, se sentent marginalisés par le pouvoir central et victime de racisme.
Des manifestations, qui ont dégénéré en affrontements, ont eu lieu début juillet en Israël. Des milliers de jeunes, dont la plupart issus de la communauté juive éthiopienne, ont combattu les forces de police. Les manifestants ont exprimé leur colère après la mort de Solomon Téka. Le dimanche 30 juin, ce jeune juif israélien d’origine éthiopienne s’est fait abattre dans des circonstances troubles par un policier qui n’était pas en service.
Sa hiérarchie a affirmé qu’une bande avait agressé l’agent en lui jetant des pierres et que, se sentant menacé, il aurait pris la décision de tirer. Version que conteste plusieurs jeunes présents et un passant, qui affirment que le policier n’a pas été agressé.
Affrontements violents
La revendication des manifestants dépasse le seul cas de Solomon Téka. Cet incident a eu un effet d’étincelle. Les juifs éthiopiens se sentent traités par les autorités comme des citoyens de seconde classe et victimes de violences policières.
Aussi appelés Falashas (« exilés ») ou Betas Israël (« maison d’Israël » ) ils sont environ 148 000 en Israël selon le bureau des statistiques. Depuis début 2019, 633 nouveaux arrivants ont été enregistrés.
Une reconnaissance tardive
La reconnaissance des Falashas par Tel Aviv ne s’est pas faite rapidement. Avant 1975, il était quasiment impossible pour des Falashas de se rendre en Israël. La reconnaissance de leur judaïté a fait débat pendant des décennies. S’ils sont officiellement reconnus en 1921 comme juifs par le Grand rabbin ashkénaze de Palestine, leur judaïté est ensuite reniée en 1948 lors de la création de l’État d’Israël. Les Falashas n’ont donc pas eu la possibilité d’immigrer vers le nouvel État.
Il faut attendre 1975 pour que le Premier ministre de l’époque Yitzhak Rabin les reconnaisse officiellement et les autorise à immigrer. Des milliers de Falashas profitent de cette occasion pour fuir leur pays, en guerre depuis la chute du dictateur Hailé Sélassié en 1974.
Le gouvernement israélien ne tarde pas à mettre en place des programmes d’immigration. Les opérations «Moïse » et «Salomon » sont lancées respectivement en 1984 et 1991. Ainsi, lors de l’opération « Salomon » , 14 000 Éthiopiens débarquent en Israël en 36 heures.
Pourquoi des juifs en Éthiopie ?
Les théories pour expliquer la présence de juifs en Éthiopie sont nombreuses. Une des explications les plus répandues affirme qu’ils seraient des descendants d’Israélites. Ces derniers auraient accompagnés Ménélik, le fils du roi Salomon et de la reine de Saba, lorsqu’il apporta l’arche d’alliance en Éthiopie au Xe siècle avant Jésus-Christ.
Une autre hypothèse les décrit comme des descendants d’une des dix tribus perdues d’Israël, la tribu des Dan. Les Falashas ont ainsi vécu pendant plusieurs siècles au nord de l’Éthiopie, évoluant entre les conquêtes chrétiennes et les guerres d’États indépendants éthiopiens.
Une intégration complexe
L’intégration de ces Juifs éthiopiens dans une société israélienne déjà divisée entre différentes communautés s’avère être complexe. En Ethiopie, la majorité des Falashas vivent en milieu rural. Une fois arrivés en Israël, ils se retrouvent la plupart du temps entassés en périphérie des villes. Le choc culturel est brutal. Depuis 1975, si leur situation sociale s’est améliorée, le niveau de disparité économique avec le reste de la population israélienne reste très important.
Ainsi, l’incident survenu dimanche 30 juin est loin d’être un cas isolé. En mai 2015, la diffusion d’une vidéo montrant le tabassage d’un soldat israélien d’origine éthiopienne par deux soldats blancs israélien avait fait scandale et avait provoqué des manifestations importantes.
Les Falashas ne sont pas seulement victimes de violences physiques et de racisme policier. Ils sont aussi victimes de politiques discriminatoires instituées par le gouvernement. En effet, en 2013, le ministère de la Santé reconnaissait avoir pratiqué des injections d’un agent contraceptif de longue durée sur des Juives éthiopiennes avant leur arrivée en Israël, et ce, sans leur consentement. Ces dernières pensaient recevoir un vaccin. Depuis 2000, le taux de fécondité des Juifs éthiopiens a chuté de 50%.
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